Dunod - Les dix plaies d'Internet- Dominique Maniez - Le modèle économique de google - page 17
recherche sur un bien matériel susceptible d’être vendu, on trouve au sommet de la liste des sites commerciaux plutôt que des sites de consommateurs donnant leur avis sur ce produit. À cet égard, le fonctionnement du moteur de recherche est parfois assez étrange : si vous saisissez comme formule de recherche « avis commentaire sur produit X », vous aurez la surprise de voir s’afficher dans la liste de résultats des pages qui parlent bien du produit X en question, mais où ne figurent pas toujours les termes « avis » et « commentaire ». L’explication est donnée quand on affiche la page en cache où une mention nous indique que « ces termes apparaissent uniquement dans les liens pointant sur cette page ». Ainsi, Google modifie sans nous demander notre avis l’équation de recherche et biaise de ce fait l’affichage des résultats. Mais le plus grave dans tout cela est qu’une majorité d’internautes ne sont pas conscients de la différence entre les liens commerciaux et les résultats de la recherche. En effet, une étude américaine1 (Pew Internet & American Life Project) publiée en 2005 montre que 62 % d’Américains ne font pas cette distinction. À ma connaissance, de telles études n’ont pas été menées en France, mais il n’est pas vraiment certain que nos compatriotes soient plus éclairés. Google est très fier de son modèle de régie publicitaire, baptisé Adwords, car c’est aussi un champion de la démocratie. Ce système est basé sur le principe des enchères : les annonceurs achètent des mots clés et proposent une certaine somme pour ces mots clés. Le lien commercial qui sera affiché en haut de la liste sera celui qui a fait l’enchère la plus élevée. Ce mécanisme est cependant pondéré par la popularité, Google privilégiant les enchères sur lesquelles les internautes cliquent le plus souvent. Google prétend qu’avec son système les PME peuvent ainsi rivaliser avec les multinationales. Google a certes eu une idée marketing de génie en proposant aux annonceurs des publicités extrêmement ciblées et, d’un strict point de vue commercial, cela paraît plutôt sensé de proposer à un internaute d’acheter des raquettes de tennis quand il a saisi ce terme dans le moteur de recherche. Mais ce bel agencement qui assure plus de 95 % du chiffre d’affaires de Google comporte quelques faiblesses qui le rendent éminemment suspect. Je ne souhaite pas ici parler du fait que certains partis politiques français achètent des mots clés bizarres (comme le terme « émeute ») ou bien que les mots clés les plus chers aient parfois un drôle d’arrière-goût (dans Google Story, David Vise raconte qu’un des termes les plus chers, « mésothéliome », qui est une forme de cancer dû à l’amiante, est 1. http://www.pewinternet.org/pdfs/PIP_Searchengine_users.pdf