La phrase noyau apparaît bien la plus simple des phrases, mais les autres
résultats ne sont pas tous conformes au modèle ; dans les phrases nécessitant
deux transformations, seule la passive-négative détermine une baisse
de rappel très nette par rapport aux phrases nécessitant une transformation,
et cette phrase passive-négative n’apparaît pas plus difficile que la
phrase à trois transformations.
Les mécanismes sont donc complexes ce qui a conduit à observer le développement
du langage chez l’enfant (cf. Florin, 1999 ; Lehalle et Mellier,
2005).
Le développement de la syntaxe
L’étude développementale de la syntaxe chez l’enfant confirme qu’un
modèle uniquement syntaxique est trop simple pour décrire la réalité psychologique
du langage. D’après une synthèse faite par Agnès Florin, spécialiste
du langage de l’enfant à l’université de Nantes, le développement
des formes syntaxiques s’étale jusqu’à la septième année avec le début des
phrases passives (tabl. 7.6).
Tableau 7.6
Quelques repères dans le développement syntaxique
(simplifié d’après Florin, 1999)
Âge Acquisitions syntaxiques
2e année
1re étape
L’enfant se sert de l’intonation pour différencier l’affirmatif
de l’interrogatif
2e étape Distinction du négatif par ajout de l’adverbe négatif :
« pas dodo » ; « apu (n’a plus) bobo »
3e étape Intégration des adverbes négatifs : « j’ai pas faim »
3e et 4e années Dans l’ordre : qui, quand, pourquoi
6e et 7e années Début d’utilisation des phrases passives
D’autres études chez l’enfant, inspirées cette fois par l’approche « logique »
de Piaget, montre que le sens l’emporte sur la règle syntaxique. Hermine
Sinclair a étudié la genèse de la transformation passive chez des enfants de
3 ans et demi à 7 ans et demi, faisant une démonstration avec des poupées
et des objets : par exemple « Jean a renversé Lucienne », « Marianne a renversé
la tasse » et on induit la transformation passive en demandant à l’enfant
: « Dis-moi ce qui s’est passé en commençant par… » Les réponses des
enfants peuvent se classer en quatre stades :
m stade 1 : les enfants les plus jeunes utilisent une seule action indifférenciée
« ça roule, ça bouge » ou répètent la phrase active « la fi lle
lave la tasse » ;
m stade 2 : la description est incomplète, par exemple, à l’induction
« commence par la tasse » la réponse est « elle est propre ». Pour
l’action : « Jean a renversé Lucienne », l’induction « commence par
Lucienne » donne la réponse : « Lucienne est tombée » avec une forte
fréquence : à 5 ans 50 %, à 6 ans 35 %, et à 7 ans : 15 % ;
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